mercredi 1 décembre 2010

L'apprentissage d'une nouvelle langue

Quand on adopte un enfant ''grand'' (bien que 4 ans, ce soit tout de même bien petit), on se préoccupe de savoir comment se fera l'apprentissage de la langue française. Avec Marthin Alexander, on avait décidé de faire les choses en douce et de ne lui parler qu'en espagnol les premières semaines. Après tout, sa vie se trouvait chamboulée du tout au tout. Inutile d'en rajouter et de lui demander, du jour au lendemain, de plonger dans un univers ou les mots n'auraient plus aucun sens pour lui.  


Après quelques semaines en Colombie, nous avons amorcé la transition en faisant suivre nos propos en espagnol de sa traduction française (Ex: Viens laver tes mains, nous allons manger). Depuis que nous sommes au Québec, nous lui parlons presque exclusivement en français. À plus de 90  % du temps. C'est impressionnant comme il a vite compris. D'ailleurs, les premières semaines, Marthin Alexander nous répètait souvent en espagnol ce que nous venions de lui dire en français.

Il arrive, lorsque nous voulons être absolument certain qu'il saisisse bien le sens d'une nouvelle consigne ou les conséquences d'un comportement non souhaitable, que nous  lui expliquions également en espagnol.
 
Depuis notre arrivée au Québec, nous avons recours à toutes sortes de prétextes pour l'aider à acquérir du nouveau vocabulaire : cuisiner ensemble, identifier les voitures rouges ou bleues lorsque nous sommes sur la route, faire des p'tits jeux de nature ''pédagogique'' à la maison. 


Pas à pas
Pour ce qui est de parler en français, notre petit bonhomme prend son temps. Il n'est pas trop pressé. Et c'est vrai que tout le monde, à la maison, comprend l'espagnol. Il n'y a pas d'urgence pour lui de passer au français.  Au début, il a intégré des expressions simples: ''C'est chaud, c'est froid". Ou encore, des mots français dans une phrase, ce qui donne de joyeux mélanges du genre: ''Donde esta mi chapeau?'' ''Mi cheveux esta muy mouillés, maman.'' On constate qu'il a complètement délaissé certains mots ou certaines expressions en espagnol.

Depuis quelques semaines, en fait depuis qu'il fréquente la garderie, il prononce aussi certaines phrases complètes en français.   Nous le faisons travailler sa diction : notamment les ''R"(qu'il a du mal à prononcer, que ce soit en français ou en espagnol) et les finales des mots, qu'il a tendance à laisser tomber.

Pour des raisons qui m'apparaissent évidentes, j'encourage très fortement tous les parents en cours de démarches en Colombie à  se mettre sérieusement à l'espagnol. Pour communiquer avec son enfant, d'abord et avant tout. Pour le sécuriser, comprendre ses besoins, interpréter ses tristesses. Une maman française que j'ai croisée dans un parc de Bogota et qui a adopté deux petits garçons (4 et 6 ans environ) me disait qu'elle et son mari ne parlaient pas du tout espagnol. Ils réussissaient à décoder les besoins de leurs enfants mais trouvaient dommage de ne pouvoir comprendre tout ce que l'aîné leur communiquait sur son passé.

Pour nous, parents québécois, une certaine maîtrise de l'espagnol nous permet aussi de multiplier les contacts avec les gens rencontrés sur place et de nous enrichir à leur contact.
Ce que nous n'avions pas prévu, au sujet de l'acquisition d'une langue étrangère, c'est à quel point nos grandes, Mathilde et Ana Maria, allaient elles aussi  faire des pas de géant. J'avais déjà initié Ana Maria à quelques rudiments d''espagnol, lui apprenant le nom des couleurs, des parties du corps... mais sans plus. Mathilde, elle, n'avait jamais été suffisamment motivée pour s'y mettre. Mais le séjour en Colombie a fait des miracles.  Nous sommes impressionnés par leur aisance... en si peu de temps. 

Dans les jours qui ont suivi son retour au Québec, Ana Maria s'adressait à notre chien Bella ... en espagnol. Et encore aujourd'hui, plus de deux mois après son retour au Québec, Ana Maria parle régulièrement en espagnol à son petit frère, surtout lorsqu'ils jouent ensemble. Il faut l'entendre passer d'une langue à l'autre en un tournemain.



Nous aimerions, comme bien des parents adoptants je crois, que Marthin Alexander puisse parler le français tout en préservant ses acquis en espagnol. Mais mes lectures sur la question me laissent croire que c'est utopique. Ce qui m'encourage toutefois c'est de voir à quel point Ana Maria a acquis une solide base en peu de temps.  Comme si l'immersion dans une contrée hispanophone avait éveillé des connaissances endormies dans un repli de sa mémoire.  Pour notre petit bonhomme, il en sera peut-être de même.  Je l'espère.

5 commentaires:

  1. Bonjour Christine,

    Je suis bien d'accord pour l'apprentissage de l'espagnol pour les enfants grands, acquérir une bonne base me semble aussi nécessaire, et encore plus quand on accueille une fratrie (notre cas, 2 enfants). Si on veut pouvoir jouer notre rôle de parents, il faut pouvoir entrer dans leur bulle (façon de parler) car j'imagine que c'est sécurisant pour eux d'avoir leur frère ou soeur qui comprenne le même langage... je ne nous imagine pas aller en Colombie sans parler un minimum espagnol, autant pour les enfants que pour échanger avec les locaux. On se priverait beaucoup à mon avis.

    Merci de nous faire partager l'après adoption de Marthin, on a tellement envie de savoir comment ça se passe une fois le retour au Québec ! J'en profite pour vous demander si vous avez eu mon courriel (j'aurais 2-3 questions à vous demander... mon mail est annebgs@gmail.com).

    À très bientôt !

    Anne

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  2. Wow, c'est vraiment impressionnant de voir l'aisance de votre petite de passer du français à l'espagnol ! Je suis très heureuse que les parents rencontrés à la réunion de mai dernier nous aient recommandé fortement d'apprendre l'espagnol. Je me rend compte à que point c'est important et nous aussi aimerions que notre petit ou petite garde sa langue maternelle au retour.
    Je suis contente aussi que mon grand de 13 ans ait été intéressé à prendre les cours d'espagnol avec nous, nous pouvons aisément comprendre une conversation et pouvons parler een utilisant des mots simples.
    Merci Kristine de nous partager l'après-adoption, je me demande toujours ce qui se passe après... Comment les enfants s'adaptent, si le lien affectif se crée, l'apprentissage de la langue, etc.
    Tu es une marraine d'adoption GÉNIALE !!!(SI je peux te nommer ainsi ;) )

    Ciao ! Karine

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  3. Merci Christine pour tout ce bagage! Nous nous sommes mis à l'espagnol dès notre inscription à SDN et nous réfléchissons justement sur la façon d'introduire le français avec nos enfants lorsqu'ils seront avec nous. Jusqu'à maintenant, nous pensons parler l'espagnol avec eux durant un bon bout de temps, questions de créer des liens affectifs le plus solide possible. Tranquillement, la télévision, les chansons et la famille (grand-parents, oncles, tantes, cousins, etc.) s'occuperont d'une bonne partie de l'apprentissage. Nous pensons peut-être nous mettre à parler davantage français quand les enfants nous montreront des signes qu'ils se sentent en sécurité. Mais on verra bien! Je en suis pas inquiète pour Marthin Alexander: à 4 ans, les enfants apprennent rapidement! Paroles d'enseignante! ;)

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  4. Eh bien, ici, on ne parle pas bcp espagnol (moi un peu plus que Papa) et pourtant, ça va super bien avec les enfants et ils comprennent beaucoup de mots français et en disent déjà beaucoup! Et ça fait juste 4 semaines que nous sommes les 4 ensembles! Faut dire que les garçons se sont vite "attachés" à nous et qu'ils ont été sécures avec nous dès le début, ça doit avoir aidé...

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  5. Merci à toutes pour vos touchants commentaires.

    À notre retour au Québec, je n'étais pas persuadée de la pertinence de poursuivre ce blog. Il est vrai que le quotidien et le retour à une vie plus ''normale'' ne génèrent pas, à première vue, autant de matière à écrire que les tribulations d'un voyage d'adoption. Mais comme le plaisir d'écrire et de vous lire est toujours présent, je compte continuer encore. A bientôt!

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